635 - Lettre de Vincent van Gogh à Théodore et Jo - Auvers-sur-Oise le 20 mai 1890

Lettre (635) Vincent van Gogh à Théodore et Jo

Auvers/sur/Oise - (le mardi 20 mai 1890)


Mon cher Theo et chère Jo,

Après avoir fait connaissance avec Jo, il me sera désormais difficile d’écrire à Theo seul, mais Jo me permettra j’espère d’écrire en français, parce qu’après deux ans dans le midi, réellement je crois ainsi faisant mieux vous dire ce que j’ai à dire. Auvers est bien beau, beaucoup de vieux chaume entre autres, ce qui devient rare.
J’espérerais donc qu’en faisant quelques toiles de cela bien sérieusement, il y aurait une chance de rentrer dans les frais du séjour car réellement c’est gravement beau, c’est de la pleine campagne caractéristique et pittoresque.
J’ai vu M. le Dr. Gachet, qui a fait sur moi l’impression d’être assez excentrique, mais son expérience de docteur doit le tenir lui-même en équilibre en combattant le mal nerveux, duquel certes il me paraît attaqué au moins aussi gravement que moi.
Il m’a piloté dans une auberge où l’on demandait 6 francs par jour. De mon côté j’en ai trouvé une où je payerai fr 3.50 par jour.
Et jusqu’à nouvel ordre je crois devoir y rester. Lorsque j’aurai fait quelques études, je verrai si il y aurait avantage à changer, mais cela me paraît injuste, lorsqu’on veut et peut payer et travailler comme un autre ouvrier, d’avoir à payer quand même le double presque, parce que l’on travaille à de la peinture. Enfin je commence par l’auberge à fr. 3.50.
Probablement tu verras le Dr. Gachet cette semaine - il a un très beau Pissarro, hiver avec maison rouge dans la neige, et deux beaux bouquets de Cézanne.
Aussi un autre Cézanne, du village. Moi à mon tour je veux volontiers, très volontiers donner ici un coup de brosse.
J’ai dit à M. le Dr. Gachet, que pour 4 francs par jour je trouverais l’auberge indiquée par lui préférable, mais que 6 était 2 francs trop cher pour les dépenses que je fais.
Il a beau dire que j’y serai plus tranquille, assez c’est assez. La maison à lui est pleine de vieilleries noires, noires, noires, à l’exception des tableaux d’impressionnistes nommés. L’impression qu’il a faite sur moi n’est pas défavorable. Causant de la Belgique et des jours des anciens peintres, sa figure raidie par le chagrin redevient souriante, et je crois bien que je resterai amis avec lui et que je ferai son portrait.
Puis il me dit qu’il faut beaucoup travailler hardiment, et ne pas du tout songer à ce que j’ai eu.
J’ai bien senti à Paris, que tout le bruit de là-bas n’est pas ce qu’il me faut.
Que je suis content d’avoir vu Jo et le petit et ton appartement, qui certes est mieux que l’autre.
Vous souhaitant bonne chance et santé et espérant vous revoir sous bien peu, bonnes poignées de main,

Vincent.


Autre référence : Vincent van Gogh The Letters : 873


Location : Amsterdam, Van Gogh Museum, inv. no. b684 V/1962


Source : Vincent van Gogh. Brieven aan zijn Broeder. Uitgegeven en toegelicht door zijn schoonzuster J. van Gogh-Bonger., Amsterdam 1914


Johanna Gezina van Gogh, née Bonger

(Amsterdam, 4 octobre 1862 - 2 septembre 1925, Laren, Hollande), est l’épouse de Théodore van Gogh et la belle-sœur de Vincent van Gogh.







Lettre N°635 de Vincent van Gogh à Theo, d’Auvers-sur-Oise du mardi 20 mai 1890…

Voir en ligne : Vincent van Gogh - The Letters

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